21 décembre 2022
Travailler en « présentiel » ou en « distanciel ». Ces expressions
témoignent de nouvelles approches du travail et ont des
implications dont nous commençons seulement à prendre
conscience. Les lieux physiques sont en question, de même
que la maturité digitale, l’adaptation du management et la
communication.
Les enseignements d’études de l’Observatoire du travail hybride et du management digital du cabinet de conseil Arctus ainsi que de l’Observatoire du New Normal au Travail fondé et piloté par Aurélie Dudézert (Institut MinesTélécom Business School) (1) nous éclairent sur le sujet.
Cet article a fait l’objet d’une publication dans Les Cahiers de communication interne n°48
de l’association française de communication interne (AFCI).
La nouvelle donne du travail questionne les lieux de vie professionnels et en particulier les bureaux. Deux domaines doivent évoluer pour soutenir la transformation du travail.
L’aménagement des lieux est un premier sujet. Il s’agit, par la modulation des espaces, de distinguer les zones et la nature des interactions envisageables : lieux silencieux, lieux où l’interaction est possible, lieux de réunion avec des variantes en termes d’équipement pour permettre des expériences hybrides, immersives, etc.
Le second concerne les règles d’usage attachées à ces lieux. Comme l’indique Aurélie Dudézert, « il est nécessaire de mettre en place des règles d’occupation des espaces de travail au même titre que le nombre de jours en télétravail est déterminé ou que les tâches qui nécessitent d’être en présentiel, distanciel ou en mode hybride sont définies ».
On retiendra par ailleurs, comme indiqué par l’Observatoire du travail hybride, que près d’un tiers des entreprises participent aux frais d’aménagement du bureau à domicile, complété par la fourniture d’outils permettant le nomadisme dans 2/3 des cas.
Ces deux dernières années d’expérimentation et de normalisation de nouveaux modes de travail ont eu un pouvoir accélérateur aussi bien du point de vue de la production que des formes de collaboration.
Deux indicateurs l’illustrent clairement : le taux d’équipement en outils permettant le travail hybride et la fréquence des accords de télétravail dans les entreprises où les métiers sont « télétravaillables ». Pourtant l’adaptation à l’usage de ces outils pose encore problème dans de nombreuses équipes. Il reste aussi à connecter les deskless workers, souvent oubliés, comme l’indiquent les directions de la communication.
C’est à ce prix que les équipes pourront partager une expérience digitale commune et disposer d’un niveau d’information similaire. Une condition nécessaire en tout cas pour garantir un sentiment d’appartenance à un collectif.
Avec le déploiement des outils digitaux, le management accélère sa mutation, se diversifie dans ses modalités d’interactions et se complexifie dans la manière de gérer les relations. Traversés par des changements dont ils n’ont pas le contrôle, les managers suivent en tout cas le mouvement et l’acculturation au digital a lieu dans la majeure partie des cas, selon l’Observatoire du travail hybride.
Il leur reste désormais à savoir animer les équipes à distance, ce qui constitue un incontestable défi. Les salariés expriment en effet des attentes fortes. Ils considèrent très majoritairement l’hybridation du travail comme une opportunité pour développer leur autonomie. Mais ils attendent aussi plus de confiance de la part de leurs managers.
Comme l’indique l’Observatoire du New Normal au travail, il faut contrôler les résultats et non les moyens et le faire en ayant recours aux outils digitaux et en formalisant les actions. Les managers doivent, en premier lieu, rendre leurs équipes plus autonomes. On voit que le gain d’autonomie doit aller de pair avec la confiance. Il y a là à la fois une demande des salariés et une opportunité de développement du télétravail.
Les enjeux pour les communicants internes sont nombreux, même si le niveau de leur engagement proprement dit sur ces projets est encore embryonnaire. Ils ne sont que 7% à porter principalement la conduite du changement liée au travail hybride selon l‘Observatoire du travail hybride.
Leur travail consiste au départ à réfléchir aux situations dans lesquelles se trouvent les différents types de salariés pour adapter les formats et les contenus. Dans un contexte d’atomisation des situations d’usage, il y a démultiplication des supports de plus en plus souvent multimédia et interactifs. On note aussi une demande expresse de plus grande transparence et de plus grande clarté de la part des salariés. L’opacité et le travestissement ne sont plus de mise. La demande de « parler vrai » s’impose.
En situation de changement, il est impératif de communiquer activement, en phase avec l’accélération du rythme. En situation de transformation, les repères établis volent en éclats et c’est bien en émettant des messages clairs et réguliers que l’on peut construire un nouveau fonctionnement et fédérer le collectif autour de modalités de travail partagées.
Le télétravail est aujourd’hui encore le plus souvent traité comme une version délocalisée du travail sur site, engendrant frustration et désengagement.
Il est essentiel d’en prendre conscience pour accompagner les managers dans leurs pratiques, former l’ensemble des utilisateurs au bon usage des outils digitaux et veiller à revoir la gestion de l’espace professionnel pour rendre l’expérience sur le lieu de travail plus engageante.
A cela s’ajoute un élément de contexte : celui de la crise sanitaire. Cet évènement a rebattu les cartes et sans doute fait bouger les lignes quant à la place qu’occupe désormais le travail dans la vie des salariés.
Beaucoup sont à la recherche d’un meilleur équilibre de vie et aspirent à trouver sens et épanouissement dans leur expression professionnelle.
La communication interne, qui a eu à gérer une communication liée à la crise sanitaire, va devoir s’atteler à un nouveau chantier : accompagner les managers dans la communication et l’appropriation des nouvelles façons de travailler. Elle a aussi à inventer de nouveaux outils pour rendre la diffusion des messages adaptés à la délocalisation du travail et à son hybridation.
Pour recréer du lien et fédérer, le rôle de la communication interne est essentiel. Une communication plus proche, plus émotionnelle parfois et plus authentique toujours.
L’OBSERVATOIRE
DU NEW NORMAL AU TRAVAIL
Objectif
L’objet de l’Observatoire est de réaliser une étude longitudinale (observation répétée dans le temps d’un phénomène et/ou d’un échantillon d’individus) pour comprendre la transformation des organisations et des modes de travail au fil du temps.
Méthodologie
Organisation de 4 focus groups mensuels de 1h30 de janvier à avril de chaque année en distanciel
Un même groupe composé d’une vingtaine de personnes expertes sélectionnées pour leur expérience et leurs capacités réflexives sur l’évolution des pratiques de travail. Ces personnes travaillent à des postes variés issus de la fonction RH ou de fonctions liées à la transformation digitale d’entreprises ou de secteurs d’activité et de tailles là-aussi variés : Air Liquide, Banque de France, BNPParibas, CHU de Poitiers, Conseil Départemental 16, DGA, FDJ, Formind, Keolis, Michelin, Neocase, SNCF, Total Energies.
Synthèse des enseignements
Le télétravail n’est pas « le » travail, le NNT combine plusieurs modes de travail
Les règles actuelles sont inadaptées et, lorsque les modes de régulation du NNT ne sont pas encore inventées, cela met les managers en difficulté
L’Observatoire a été fondé par Aurélie Dudezert et Florence Laval. Il est développé et piloté avec le soutien de l’Institut Mines Télécom Business School et l’IAE de Poitiers.
L’OBSERVATOIRE DU TRAVAIL HYBRIDE
ET DU MANAGEMENT DIGITAL
Objectif
Mesurer l’adaptation des organisations à l’hybridation du travail, sous le prisme des outils digitaux et du management des équipes, capter les signaux qui porteront le changement dans les organisations dans les prochaines années, technologiquement et humainement.
Pour cette première édition le questionnement se concentre sur :
Méthodologie
Enquête réalisée auprès 829 répondants issus de 752 entreprises françaises de toute taille des secteurs d’activité des services, de l’agroalimentaire, de l’industrie et du service public, soit + de 4,5 millions de salariés représentés, à travers un questionnaire en ligne ouvert du 1er février au 7 avril 2022.
Synthèse des enseignements
Hybridation du travail : une évolution inéluctable mais inachevée.
L‘Observatoire du travail hybride et du management digital a été créé par Arctus, société de conseil en transformation numérique interne.
(1) Aurélie Dudézert est responsable du IS Lab IMT BS. Habilitée à diriger les recherches et agrégée des Universités en Management des Systèmes d’Information, elle étudie les transformations organisationnelles liées à l’utilisation des technologies collaboratives dans les pratiques de travail. Elle est l’auteure d’articles scientifiques et d’ouvrages, membre de comités éditoriaux de revues scientifiques et elle appartient au Business Science Institute, une institution internationale indépendante dont l’objectif est de développer l’enseignement des cadres d’entreprise au niveau doctoral dans le monde entier.
Pour obtenir plus de détails sur
les précédentes éditions
des Cahiers de la communication interne :
Fondatrice d'Arctus, Associée
Fondatrice et dirigeante d’Arctus, Isabelle est aussi auteur et conférencière. Depuis 2007, elle partage son regard et apporte des éclairages sur les transformations internes que traversent les organisations au travers d'études et observatoires tels que l'Observatoire du Travail hybride et management digital, l'Observatoire Intranet & Digital Working ou l'Observatoire de la Créativité. Elle est également administratrice et membre actif de l'AFCI, l'Association Française des professionnels de la Communication Interne
Arctus est une société de conseil et d’accompagnement au changement, experte en transformation digitale interne. Nous aidons les organisations, les managers et les collaborateurs à mieux travailler ensemble par la mise en place de dispositifs digitaux et le déploiement d’usages collaboratifs et sociaux.
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